Fiche technique :

Notre avis sur RESURRECTION

Nouveau long-métrage du réalisateur Andrew Semans après Nancy, Please, Ressurection est l’une des découvertes intéressantes de cette quinzième édition du FEFFS (Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg). Thriller jouant sur l’ambivalence des maux traumatiques et psychologiques, ce deuxième long du cinéaste ne laissera personne indifférent face à la paranoïa naissante et grandissante de sa protagoniste (incarnée avec intelligence par Rebecca Hall) . Ou au contraire, il laissera dans l’impassibilité la plus totale le spectateur qui, parfois, manquera d’élément viable pour comprendre pleinement l’enjeux de son propos.

Vu de l’extérieur, Margaret (Rebecca Hall) semble être une femme épanouie sur tous les plans : mère célibataire d’une adolescente atteignant bientôt la majorité, amante d’un homme déjà marié et est doté d’un self-control à toute épreuve lui permettant de mener de front une carrière stable et confortable comme biologiste dans un cabinet. Mais à l’approche du départ de sa fille pour l’université, quelques événements viennent perturber la tranquillité d’esprit de Margaret ; des incidents imprévus et notamment la réapparition soudaine de son amant de jeunesse, David (Tim Roth), un homme sadique et cruel, la font immédiatement plonger dans une psychose où ressurgissent tous les traumas passés de cette ancienne relation.

 Avec sa mise en scène très épurée, dépouillée, aux décors banals, Andrew Semans signe un thriller des plus efficace et intelligent. Tout dans la réalisation montre peu à peu l’étendu de la paranoïa et de ses répercussions subies par Margaret, véritable fil conducteur du film. Rêve ou réalité ? Fantasme ou cauchemar insidieux ? Malgré quelques indices, distillés ça et là tout au long de l’histoire, rien ne permet d’identifier exactement le vrai du faux, ce qui vient d’autant plus troubler notre simple vision de spectateur. On peut alors effectivement se demander si tout cela n’est pas décousu, voir incompréhensible, car certains spectateurs seront perdus dans tout ce cheminement incertain, ce tunnel  émotionnel complexe et ambigu. Jusqu’à sa scène finale, rien ne paraîtra aussi vrai que l’esprit et le corps traumatisé de Margaret.

L’interprétation sans faille et ardente de son actrice Rebecca Hall, qui oscille entre force et fragilité, s’accorde à la narration et au personnage de Margaret, donnant tout son sens à la définition du mot traumatisme. La sobriété de la mise en scène quelque fois lugubre, apporte à son personnage un effet inquiétant, toujours dans le souci de jouer sur l’ambivalence de son psychisme. Tim Roth, dont la présence est ici très bien utilisée, insuffle à son personnage toute la dominance et la toxicité masculine d’une époque pas totalement révolue et qui reste d’actualité. Car c’est bien de ça qu’il est question ici : l’emprise masculine, ses abus et les traumatismes qu’elle créer en chacune de ses victimes.

Ressurection est finalement la définition même du parcours épuisant et éprouvant que subis sa victime : celle du réveil brutale d’une blessure dont les fils se sont rompus, d’une tempête émotionnelle qu’on avait pas vu venir, celle d’un traumatisme qui resurgit dans une vie qu’on a voulu bien ranger, contrôler. Et puis, un événement, une situation ou les aléas de la vie font ressurgir en nous ce que nous avons toujours si bien caché aux autres mais surtout à nous même, pour se conserver  ou du moins préserver l’univers déjà si fragile d’une existence corrompue par la cruauté des Hommes.

Un film à voir, à réfléchir, à mûrir, afin de comprendre que cette oeuvre cinématographique est finalement bien plu importante qu’il n’y parait tout en nous rappelant que notre monde actuelle n’a peut-être pas totalement progressé quant à la question des abus et des violences faites sur les femmes et les répercussions psychologiques que cela engendre.

Par Rémi Vallier

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